Tout d'un coup, votre chien se met à courir partout, à vous sauter dessus, voire à vous mordiller sans faire attention à la pression qu'il met dans sa mâchoire. Ses pupilles sont dilatées et vous allez jusqu'à avoir peur de lui lorsqu'il se met dans cet état. Alors, vous commencez à généraliser aux moments où vous savez qu'un ou plusieurs de ces comportements vont survenir. Bon nombre d'entre vous se retrouvent perdus quant à l'attitude de leur chien : est-il agressif ? Pourquoi ne répond-il plus à rien ? Il a un air « méchant » et il ne parvient pas à se calmer. Surprise ! Vous faites probablement face à une décharge émotionnelle de la part de votre chien.
LES MOMENTS PROPICES À CES DÉCHARGES ÉMOTIONNELLES
Les décharges émotionnelles surviennent plus fréquemment chez le chiot et le chien adolescent étant donné que la gestion émotionnelle est encore en apprentissage, cependant elles sont également souvent observables chez les chiens sensibles ou ceux de refuge n'ayant jamais eu l'occasion de faire l'expérience de certaines situations. Le cerveau étant en croissance chez les jeunes chiens, il est tout à fait logique qu'ils ne gèrent pas encore les réactions qu'ils peuvent avoir lorsqu'ils se trouvent confrontés à certaines émotions.
Ces décharges surviennent généralement lorsqu'une émotion est trop forte et que de fait, votre chien ne parvient plus à la gérer. Ainsi, cela peut être lors d'une balade avec pas mal d'excitation comme des courses ou des jeux, sans lui permettre de redescendre de façon progressive. Ça peut aussi arriver dans le jardin à la suite d'un moment de jeu sans introduire d'activité calme à la suite de ce dernier ou même en plein centre ville en demandant un demi-tour à votre chien qui rencontre alors un moment de frustration.
Vous l'aurez compris : cela peut survenir dans n'importe quel endroit, pour autant pas à n'importe quel moment. Il vous faudra apprendre à distinguer les situations qui amènent des soucis de gestion émotionnelle chez votre chien pour mieux lui permettre d'apprendre à les gérer.
LES ÉMOTIONS EN CAUSE
On pourrait être amené à penser que ces décharges émotionnelles ne sont que liées à de l'excitation, voire à de la frustration, en réalité plusieurs émotions peuvent être à l'origine de ces dernières. Si votre chien est effectivement très excité à la suite d'un jeu et qu'il n'a pas pu redescendre en pression, c'est un terreau fertile pour une décharge émotionnelle. Pour autant, il peut également y avoir une décharge émotionnelle à la suite d'un changement de direction, quand on ne laisse pas son chien aller sentir une odeur ou lorsqu'on l'empêche d'aller voir un congénère. Cette décharge est alors liée à la frustration de ne pas pouvoir avoir accès à quelque chose.
Une décharge émotionnelle peut également survenir à la suite d'un moment de stress ou de peur, pour évacuer une émotion négative. Elle peut aussi avoir lieu lorsqu'un chien est fatigué ou en sur-stimulation, il va alors y avoir ce genre de comportement car il n'en pourra tout simplement plus.
LES COMPORTEMENTS POSSIBLES
Les sauts, les mordillements, voire les pincements, le fait de courir, de creuser ou de secouer un jouet en gueule peuvent être des comportements présents pour décharger une émotion forte. Le chien va aller vers un comportement naturel pour réussir à dégager un trop plein émotionnel sur le moment. Malheureusement, ce sont généralement des comportements que l'humain percevra comme étant indésirables ; à raison pour certains d'entre eux qui peuvent amener un danger dans certaines situations.
La prise en gueule peut manquer d'inhibition sur un tel moment et de fait, peut conduire à des pincements plutôt qu'à des mordillements, voire à de vraies morsures en fonction de la capacité du chien à gérer la pression mise dans sa gueule. Les sauts peuvent également être complexes à gérer en fonction du gabarit du chien et de la situation dans laquelle vous vous trouvez, s'il y a des personnes autour de vous ou de la circulation par exemple.
LE RÉFLEXE HUMAIN
Sur ces moments de décharge émotionnelle, où votre chien ne vous entend plus, ou n'est plus en capacité de répondre à une demande de votre part, la contention est généralement utilisée. Ou bien la violence, comme le fait d'étrangler son chien, l'asperger de spray ou secouer des cailloux dans une bouteille. Le fait de plaquer son chien et de le maintenir au sol est quelque chose de fréquemment reporté comme étant « la seule solution » trouvée sur le moment pour garantir la sécurité du chien aussi bien que celle de l'humain. Tous ces réflexes possibles n'ont pas à être jugés : ils surviennent car l'humain ne se sent plus en sécurité et sont donc compréhensibles, pour autant ils ne permettent en rien de résoudre la problématique de fond qu'il convient d'étudier en profondeur. Rappelons que ni la violence ni la contention ne permettent à un chien d'apprendre à gérer ses émotions, au contraire elles ajoutent du stress voire de la peur à un moment déjà bien compliqué pour lui.
QUEL COMPORTEMENT ADOPTER EN TANT QU'HUMAIN
Analysez en premier lieu les moments où votre chien est susceptible de décharger une émotion forte. Est-ce lié à de l'excitation ? De la frustration ? Du stress ? De la fatigue ? De la douleur dans le cas d'un chiot qui a mal aux dents ? En arrivant à comprendre ce que vit votre chien, vous serez déjà plus à même de l'aider et ainsi, vous pourrez anticiper.
Lorsqu'il s'agit d'excitation, notamment à la suite d'une partie de jeu, n'hésitez pas à ralentir en premier lieu le jeu de façon progressive. Ainsi, votre chien pourra redescendre tranquillement en excitation alors que le rythme du jeu va decrescendo. Le but étant de terminer ce dernier par une activité calme à la fin, en l'invitant à mordiller ou à lécher quelque chose, ou à revenir dans son flair en lançant une friandise au sol, puis deux, puis trois, et ainsi de suite en le faisant chercher de façon progressive. N'essayez pas de disperser directement des friandises au sol sans passer par les étapes précédentes : proposer une activité de flair à votre chien alors qu'il est en non gestion émotionnelle, ça ne fonctionnera pas sans lui apprendre à redescendre en pression au préalable. (Essayez donc de me faire lire quelque chose alors que je suis dans des montagnes russes, on va rire... Et c'est la même chose pour votre chien.)
Si votre chien se met à frustrer, vous pouvez lui proposer de décharger cette émotion forte sur un jouet en tirant avec lui puis en répétant les étapes ci-dessus. Vous pouvez également choisir de lui apprendre à venir vers vous en récompensant le fait d'avoir fait demi-tour pour éviter une montée en pression qui conduirait à une décharge émotionnelle, ainsi vous lui permettrez de mieux appréhender le renoncement sans que cela ne conduise à une frustration qu'il serait incapable de gérer. Vous pouvez le travailler sous forme de « touche ma main » qui lui permet alors de se concentrer sur un comportement induisant du calme étant donné qu'il aura été travaillé en amont chez vous.
Quand votre chien se trouve face à une situation stressante, permettez-lui de s'en éloigner et récompensez-le par la suite, de sorte à valoriser le fait de prendre de la distance. De cette façon, vous pouvez anticiper et éviter une décharge émotionnelle. Là encore, vous pouvez également lui proposer de décharger une émotion forte sur un jouet, ou tout simplement en lui proposant quelque chose à prendre en gueule s'il ressent le besoin de mastiquer pour faire passer une situation stressante. Tout est bon pour lui permettre de décompresser.
Enfin, si votre chien est fatigué, surveillez les signaux indiquant qu'il en a trop fait sur sa journée. Le but n'étant pas de le « griller » en pensant que vous serez tranquille à la maison à la suite d'une balade par exemple. Au contraire, valorisez les activités de flair, apprenez à votre chien qu'une promenade ne signifie pas forcément courir partout et jouer tout le temps, mais qu'au contraire elle peut être un moment de détente également. Veillez à faire attention à cette fameuse « jauge » de stress vue dans un des articles précédents, ainsi vous veillerez à ne pas trop le fatiguer.
Bien entendu, ces solutions sont génériques, il n'est pas dit qu'elles correspondent à ce dont votre chien à besoin. Parfois, il y a besoin d'en apprendre davantage au niveau des signaux de communication canins pour mieux pouvoir anticiper ce genre de moment et savoir comment réagir. Ainsi, n'hésitez jamais à vous faire aider par un(e) professionnel(le) bienveillant(e) et compétent(e). Et par bienveillant(e), j'entends : sans outil coercitif (pas d'étrangleur, de semi-étrangleur, de laisse lasso, de spray, de bouteille de cailloux et j'en passe), sans dominance de l'humain envers le chien mais aussi et surtout en vous disant de quoi votre chien a besoin à ce moment précis pour pouvoir redescendre d'une émotion forte, sans passer par la contrainte, ni par la menace.
© Toutougether - Nicoline Droogmans
06 36 10 04 84
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